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Le pouvoir d’un univers bien bâti

Le cas Wicked

La sortie officielle vendredi dernier de Wicked : For Good marque bien plus qu’un simple rendez-vous au cinéma. C’est l’aboutissement d’une stratégie marketing parfaitement huilée, pensée pour saturer, surprendre et mobiliser. Et surtout, pour évoluer avec justesse au fil du temps.

De la saturation publicitaire à l’entretien de l’attention

Pour le premier film en 2024, Universal n’avait pas lésiné sur les moyens. Plus de 400 partenariats de marques, une présence remarquée au Super Bowl, et une stratégie de visibilité massive que Michael Moses, le CMO de Universal, qualifiait de « just short of obnoxious ». Dans un paysage culturel où l’attention se fragmente, l’objectif était clair : être partout, tout le temps. Wicked s’est ainsi imposé non plus comme un simple film, mais comme un véritable univers identitaire.

Avec le second volet, la démarche se fait plus subtile. Le premier film datant d’à peine un an, la notoriété est déjà solidement installée. Plutôt que de relancer une vague publicitaire gigantesque, Universal recentre ses efforts : davantage de produits dérivés, une présence médiatique plus mesurée, moins d’exposition forcée. L’idée est simple : entretenir l’intérêt sans saturer. Le premier opus a posé les bases ; le second capitalise tout en préservant la fraîcheur. Une évolution stratégique essentielle pour éviter la fatigue publicitaire.

Brand partnerships & co-création : un modèle à suivre

Avec des centaines de collaborations (jouets, mode, cosmétiques, cafés thématiques, etc.), Wicked adopte une logique proche de celle du phénomène Barbie en 2023, présentant aussi un personnage central féminin. LEGO Emerald City, produits de beauté inspirés des personnages, expérience Airbnb : chaque partenariat insuffle une partie de l’univers dans le quotidien du public. Le marketing dépasse la promotion traditionnelle pour créer un véritable écosystème culturel.

La co-création joue aussi un rôle clé. Les fans choisissent le personnage qui leur ressemble, s’habillent en vert ou en rose, se reconnaissent entre eux. Wicked ne vend plus seulement un récit, mais une appartenance. Les salles de cinéma se remplissent de duos aux couleurs de Glinda et Elphaba, et Halloween a confirmé à quel point ces deux archétypes résonnent fort auprès du public. Ce phénomène d’appropriation n’est pas nouveau. On l’a déjà observé avec Harry Potter et le choix des maisons, et de manière encore plus marquée récemment avec les succès de Barbie et Wicked. L’expérience collective qui se crée autour d’un film peut même rappeler celle du film Rocky Horror Picture Show. Ce film est devenu culte, entre autres dans les communautés LGBTQ+, parce qu’il permet une forte identification aux personnages et un sentiment d’appartenance vécu.

Entre nostalgie et découverte: Wicked comme pont générationnel

Un des grands succès de Wicked est sa capacité à rassembler de multiples générations : les nostalgiques qui connaissent la comédie musicale ou le livre original, et les curieux qui découvrent l’univers pour la première fois. Comme Top Gun : Maverick avant lui, Wicked réussit cet équilibre délicat entre hommage au passé et ouverture vers une nouvelle génération.

Le film intègre d’ailleurs plusieurs clins d’œil à l’œuvre originale, sans chercher à la remplacer. Il s’inscrit dans une continuité douce, respectueuse, qui permet à chacun de s’y retrouver : ceux et celles qui reviennent par affection, et ceux et celles qui arrivent par curiosité.


En conclusion, Wicked démontre qu’une stratégie ne doit pas chercher seulement à vendre et diffuser des messages, mais à être vécue. La réussite d’une campagne repose sur quelques principes simples mais incontournables:

  • Construire un univers de marque avant de vendre un produit. L’imaginaire a un pouvoir fort qui n’est pas à négliger, que la communication va venir soutenir.

  • Adapter l’intensité de la communication au cycle de vie (avant, pendant et après). On lance en force, puis on entretient avec finesse.

  • Miser sur des partenariats cohérents avec la marque qui prolongent l’expérience plutôt qu’ils la parasitent.

  • Offrir aux publics des points de contact multiples, pour élargir la portée sans diluer l’essence.

  • Cultiver la nostalgie et faire vivre la marque à travers le temps, en pensant à la fois aux générations actuelles et futures.

J’ai pris un réel plaisir à me replonger dans l’univers coloré du Magicien d’Oz. C’est une suite réussie qui évite la répétition, tout en assurant une connexion avec le premier film. Et après avoir revu les deux volets, je peux le dire sans hésiter : je suis définitivement plus une Elphaba qu’une Glinda, et vous?